Microbiote intestinal et cellule β pancréatique

Le microbiote intestinal informe le cerveau et la cellule β pancréatique via la production d'acétate

Perry R.J. et al. Acetate mediates the macrobiome-brain-β-cell axis to promote metabolic syndrome. Nature 2016 ; 534 : 213-217.
Trajkovski M et Wollheim C.B. Physiology : microbial signals to the brain control weight. Nature 2016 ; 534 : 185-187.

Le microbiote intestinal joue de nombreux rôles dans l'organisme. Dans le dernier numéro de Nature, l'équipe américaine de Gérald Shulman, à Yale (Etats-Unis), met en évidence un nouveau rôle du microbiote intestinal vis-à-vis de la stimulation de l'insulinosécrétion et cela par une signalisation passant par le cerveau.

Des études préalables ont montré des liens entre les concentrations d'acide gras à chaînes courtes dans le plasma et dans les selles, associées à la suralimentation, à l'obésité et au syndrome métabolique. Afin de mieux comprendre ces liens, cette équipe a d'abord mis au point une méthode permettant de mesurer les taux de renouvellement de l'acétate du propionate et du butyrate au niveau de l'organisme entier par une technique de spectrométrie de masse/chromatographie gazeuse. Le turnover de l'acétate, de même que les concentrations plasmatiques et fécales d'acétate, étaient très augmentées chez les rats insulinorésistants après 3 jours ou 4 semaines de régime riche en graisses contrairement à ce qui était observé pour le propionate et le butyrate. De plus, en perfusant les estomacs de rats sous régime normal avec de l'acétate pendant 10 jours, ils ont constaté une augmentation de la sécrétion d'insuline stimulée par le glucose. Certes, le glucose est le stimulus principal de la sécrétion d'insuline mais celle-ci est aussi sous le contrôle du système nerveux parasympathique et en particulier du nerf vague.

Cette propriété d'augmentation de l'insulinosécrétion par la perfusion d'acétate était bloquée par l'administration d'un bloqueur du parasympathique comme l'atropine ou en coupant les branches du nerf vague. Ces résultats indiquaient donc que l'augmentation, induite par l'acétate, de la sécrétion d'insuline était contrôlée par le système parasympathique.

Afin de montrer qu'il s'agissait bien d'un effet du parasympathique et non d'un effet direct sur la cellule β, ils ont montré que l'acétate n'était pas capable de stimuler l'insulinosécrétion des cellules β des îlots pancréatiques alors que l'administration d'acétate en intra-cérébro-ventriculaire ou dans le système nerveux augmentait cette sécrétion d'insuline.

Ces mêmes auteurs ont ensuite analysé l'effet du turnover de l'acétate sur l'appétit. Une augmentation chronique du turnover de l'acétate favorisait la prise alimentaire et cela via la ghréline dont les concentrations étaient élevées chez les rats hyperphagiques en comparaison des témoins. Les rats hyperphagiques développaient une obésité, probablement du fait de la combinaison de l'augmentation de la sécrétion d'insuline et de ghréline. Comme les acides gras à chaînes courtes sont les produits de la fermentation bactérienne, ils ont ensuite cherché à mieux comprendre le rôle du microbiote intestinal dans le turnover de l'acétate. En transplantant des fèces de rats donneurs sous régime normal ou sous régime riche en graisses chez des receveurs au régime opposé, ils ont trouvé que le taux de turnover de l'acétate, les concentrations fécales d'acétate et l'insulinosécrétion dépendante du glucose du groupe donneur étaient transférés au receveur, impliquant que ces modifications dans le microbiote étaient les responsables de la régulation de ces facteurs. En l'inverse, en cas de déplétion du microbiote qui inhibait le turnover de l'acétate et diminuait les concentrations de ghréline, le contenu en graisse du muscle squelettique diminuait d'un facteur 2 à 5.

Ces données suggèrent donc un lien mécanistique entre le début de l'obésité et le microbiote intestinal. L'augmentation médiée par le microbiote du turnover de l'acétate survenant au cours de l'exposition à un régime riche en calories pourrait médier une boucle de rétrocontrôle entre le microbiote intestinal et le système nerveux parasympathique, favorisant l'hyperphagie conduisant à une augmentation de la sécrétion de ghréline et à une augmentation du stockage d'énergie sous forme de graisses du fait d'une augmentation de l'insulinosécrétion.

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