Chirurgie bariatrique et hypoglycémie postprandiale

Hypoglycémie postprandiale après chirurgie bariatrique : quels sont les facteurs de risque ?

Nannipieri M. et al. Risk factors for sponteneously self-reported postprandial hypoglycemia after bariatric surgery. J Clin Endocrinol Metab 2016 ; 101 : 3600-3607.

Même si cela est rare, les patients après chirurgie bariatrique peuvent développer des hypoglycémies hyperinsulinémiques avec des signes neuroglycopéniques nécessitant une hospitalisation.

Ainsi, 1 à 3 ans après bypass gastrique Roux-en-Y, 30 % des patients environ ont des symptômes d'hypoglycémie postprandiale faibles à modérés, qui souvent se règlent grâce à des modifications diététiques. Mais pourquoi certains patients développent ces hypoglycémies postprandiales alors que d'autres n'en font pas ? Il est probable que les altérations de l'anatomie gastro-intestinale et de l'innervation gastrique jouent un rôle important dans la vidange gastrique, les repas étant plus rapidement transférés depuis l'estomac jusqu'à l'intestin grêle, ce qui exposé l'intestin à des charges supérieures d'hydrates de carbone non digérés alors que l'absorption du glucose dans la circulation est accélérée. L'hyperglycémie qui en résulte stimule la sécrétion rapide et excessive d'insuline qui peut favoriser une hypoglycémie retardée. Un rôle des incrétines a également été suggéré. Si l'hypoglycémie postprandiale est une complication bien connue de la chirurgie bariatrique et en particulier du bypass gastrique Roux-en-Y, on dispose, en revanche, de peu de données sur les hypoglycémies postprandiales après gastrectomie sleeve par voie laparoscopique.

Une équipe italienne de Padoue et de Pise a essayé d'identifier ce qui en préopératoire permettait de prédire la survenue de ces hypoglycémies postprandiales, rapportées de manière spontanée par les patients, après chirurgie bariatrique.

Un groupe de patients non diabétiques rapportant de manière spontanée les symptômes ou les signes d'hypoglycémie postprandiale (21 avaient eu un bypass gastrique Roux-en-Y et 11 une gastrectomie sleeve laparoscopique) a été comparé à des sujets qui ne s'étaient jamais plaints d'hypoglycémie spontanée ou d'hypoglycémie induite par une HGPO et cela pendant deux ans après la chirurgie (groupe sans hypoglycémie postprandiale comportant 13 patients ayant eu une gastrectomie Roux-en-Y et 40 ayant eu une gastrectomie sleeve laparoscopique). La sensibilité à l'insuline a été évaluée par un index de sensibilité à l'insuline au cours d'une HGPO et une mesure de la fonction β-cellulaire par modélisation mathématique de la réponse du C peptide au glucose.

Avant chirurgie, l'IMC était inférieur dans le groupe hypoglycémie postprandiale en comparaison du groupe sans hypoglycémie postprandiale aussi bien chez les patients ayant eu un bypass grastrique Roux-en-Y (p = 0.002) que dans le groupe sleeve gastrectomie laparoscopique, même si cette diminution n'était pas significative (p = 0.08). La glycémie à jeun et le nadir de glycémie après HGPO étaient inférieurs dans le groupe hypoglycémie postprandiale en comparaison du groupe pas d'hypoglycémie postprandiale et cela dans les deux groupes bypass gastrique Roux-en-Y et gastrectomie sleeve laparoscopique. Avant la chirurgie, la sensibilité à l'insuline était supérieure dans le groupe hypoglycémie postprandiale en comparaison du groupe pas d'hypoglycémie postprandiale et cela chez les patients ayant eu un bypass gastrique Roux-en-Y (393 ± 55 versus 325 ± 44 ml/min/m2, p = 0.001) que dans le groupe gastrectomie sleeve laparoscopique (380 ± 48 versus 339 ± 60 ml/min/m2, p = 0.05) et s'est améliorée de manière identique dans les deux groupes après chirurgie. Avant chirurgie, la sensibilité au glucose de la cellule β était supérieure dans le groupe hypoglycémie postprandiale en comparaison du groupe pas d'hypoglycémie postprandiale aussi bien chez les patients ayant eu un bypass gastrique Roux-en-Y (118 ± 67 versus 65 ± 24 pmol/min/m2/mmol) que dans le groupe gastrectomie sleeve laparoscopique (114 ± 32 versus 86 ± 33, p = 0.02) et s'est améliorée chez tous les sujets après chirurgie.

En conclusion, chez les sujets qui rapportent des symptômes d'hypoglycémie postprandiale après chirurgie bariatrique, les glycémies avant chirurgie sont inférieures, la sensibilité à l'insuline est supérieure et la sensibilité de la cellule β au glucose est meilleure en comparaison de ceux qui ne vont pas faire d'hypoglycémie postprandiale après chirurgie. Il s'agit donc de facteurs prédictifs significatifs de survenue d'hypoglycémie postprandiale aussi bien bypass gastrique Roux-en-Y qu'après gastrectomie sleeve laparoscopique.

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