Quel antihypertenseur chez le diabétique ?
Il n'y a pas de réel intérêt à utiliser les bloqueurs du système rénine/angiotensine (SRA) plutôt que les autres antihypertenseurs chez les diabétiques sans néphropathie
Bangalore S. et al. Diabetes mellitus as a compelling indication for use of renin angiotensin system blockers : systematic review and meta-analysis of randomized trials. BMJ 2016 ; 352 : i438.
Majumdar S.R. Antihypertensive treatments for adults with type 2 diabetes. Editorial. BMJ 2016 ; 352 : i560.
Les diabétiques ont un risque accru de pathologie cardiovasculaire et rénale. Des essais contrôlés versus placebo ont bien montré les bénéfices significatifs de l'utilisation des bloqueurs du système rénine/angiotensine (SRA) sur les événements cardiovasculaires et rénaux chez les diabétiques. Il a toujours été clamé que ces effets étaient indépendants de la simple baisse de la pression artérielle induite par ces médicaments, ce qui a conduit l'American Diabetes Association, en 2015, à recommander les bloqueurs du SRA, qu'il s'agisse des inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) ou des antagonistes du récepteur de l'angiotensine (ARA2) comme traitement de première intention chez les diabétiques hypertendus.
En revanche, en 2013, les recommandations conjointes de la Société Européenne de Cardiologie et de la Société Européenne de l'Hypertension ainsi que le Comité National sur la prévention et la détection, l'évaluation et le traitement de l'hypertension artérielle (JNCPDETHBP) aux Etats-Unis, ont recommandé l'utilisation de n'importe quelle classe d'antihypertenseur chez les diabétiques en indiquant simplement une préférence pour les bloqueurs du SRA en cas de protéinurie ou de microalbuminurie.
Ces recommandations, apparemment discordantes, interrogent sur les données scientifiques permettant de privilégier pour ses effets cardio-protecteurs et rénaux-protecteurs supérieurs les bloqueurs du SRA chez les diabétiques.
Une équipe américaine a donc réalisé une revue systématique avec une méta-analyse des essais randomisés afin d'explorer si les bloqueurs du SRA étaient réellement supérieurs aux autres antihypertenseurs dans la prévention des événements cardiovasculaires et rénaux chez les diabétiques. Leur recherche leur a permis de trouver 19 essais contrôlés, randomisés qui avaient enrôlé 25 494 participants diabétiques pour un total de 95 910 patients/année de suivi. Lorsqu'ils étaient comparés à d'autres agents antihypertenseurs, les bloqueurs du SRA étaient associés à un risque similaire de décès (risque relatif = 0.99 ; IC 95 % = 0.93 – 1.05), de décès cardiovasculaire (RR = 1.02 ; 0.83 -1.24), d'infarctus du myocarde (0.87 ; 0.74 – 1.18), d'angor (0.80 ; 0.58 – 1.11), d'AVC (1.04 ; 0.92 – 1.17), d'insuffisance cardiaque (0.90 ; 0.76 – 1.07) et de revascularisation (0.97 ; 0.77 -1.22). Il n'y avait pas non plus de différence pour ce qui concernait les complications rénales sévères comme l'insuffisance rénale terminale (0.99 ; 0.78 – 1.28).
En conclusion, si l'on en croit cette étude, chez les diabétiques hypertendus, les bloqueurs du système rénine/angiotensine ne semblent pas supérieurs aux autres classes d'antihypertenseurs comme les thiazidiques, les inhibiteurs calciques ou les β-bloquants pour réduire le risque d'événements cardiovasculaires et rénaux.
Ces données vont donc bien dans le sens des recommandations de la Société Européenne de Cardiologie et de la Société Européenne d'Hypertension et du 8ème JNCPDETHBP qui proposent d'utiliser aussi bien les autres antihypertenseurs que les bloqueurs du système rénine/angiotensine chez les diabétiques hypertendus sans néphropathie.